Premières conventions avec Netflix, Disney+, Amazon, 250M€ attendus, part du lion pour la fiction, flux inclus

Le CSA a signé hier les conventions des principales plateformes SVOD,  Netflix, Disney+ et Amazon Prime Video, et notifié service de vidéo à la demande payant à l’acte d’Apple, en application du décret du 22 juin 2021 relatif aux services de médias audiovisuels à la demande (Smad), qui intègre ceux-ci au système français de contribution au financement de la production. 

Selon le décret, les plateformes SVOD doivent investir un minimum de 20% de leur chiffre d’affaires en France dans la production audiovisuelle et cinématographique, réparti à 80/20 entre les deux, et 25% si elles veulent diffuser les films avant 12 mois.  Les discussions avec le cinéma sur l’aménagement de la chronologie des médias n’ayant pas encore abouti, c’est la version la plus light qui a été négociée dans les conventions, avec possibilité d’ajouter les obligations relatives au cinéma par notification, a indiqué le CSA.

Avant la fin de l’année 2021, cinq autres services concernés par la règlementation devront également conclure des conventions avec le CSA, indique encore l’institution, ou le cas échéant, se voir notifier leurs obligations. Le montant total attendu des contributions à la production audiovisuelle et cinématographique devrait se situer en année pleine dans une fourchette de 250 à 300 millions d’euros, estime le CSA.  

Plus de souplesse pour la production en langue anglaise et pour les émissions de flux

Les conventions de Netflix, Amazon Prime Video, et Disney+ sont construites selon un modèle similaire. Elles investiront 20% de leur chiffre d’affaires dans la production audiovisuelle et cinématographique européenne dont 75% sont d’expression originale française. La répartition entre audiovisuel et cinéma est de 80/20 (soit 16% du CA pour la production audiovisuelle). Les deux-tiers des dépenses doivent être consacrées à la production indépendante. La partie audiovisuelle doit concerner à 95% les oeuvres audiovisuelles patrimoniales : fiction, animation, et documentaire de création, laissant donc une flexibilité de 5% (équivalant à un investissement de 0,8% du CA). Les émissions dites de flux se retrouvent donc, sans être citées, inclues dans les obligations. Jusqu’à présent en ce domaine les plateformes ont surtout produit de la télé-réalité.

Quelques obligations spécifiques par genre

Les plateformes ont également des obligations spécifiques au titre de la diversité des genres. Netflix consacrera ainsi 4,4% de ses obligations audiovisuelles à la production d’animation et Disney+ 3,5%, tandis que rien n’est mentionné pour Amazon pour ce genre. Pour ce qui est des documentaires, Netflix y consacrera un très petit 0,6%, Amazon Prime Video 3%, et Disney+ 1,5%. Les spectacles vivants (captation ou recréation de spectacles vivants) bénéficient d’un investissement spécifique de 3% chez Amazon. Sans avoir cependant d’obligation spécifique, la fiction, qui constitue ce qui reste, garde donc très largement la part du lion.

Le chiffre d’affaires d’Amazon Prime Video étant difficile à calculer, et l’interprétation du CSA et d’Amazon différant, les deux parties sont tombées d’accord sur un montant entre deux (supérieur à l’interprétation d’Amazon) de 20M€ en 2021 et 40M€ à compter de 2022.

Le cas d’Apple

Dans le cas d’Apple, le CSA a émis une notification concernant l’Apple TV App – iTune Store, c’est à dire le service payant à l’acte édité par Apple. Il devra consacrer 15% du CA issu de l’exploitation de films à la production d’oeuvres cinématographiques européennes, dont 12% d’expression originale française, et les mêmes pourcentages à la production d’oeuvres audiovisuelles. S’agissant du service par abonnement Apple TV+, le service n’a pas fait l’objet de convention ni de notification, ne franchissant pas encore le seuil de déclenchement des obligations des décret, nous a précisé le CSA.

LA SACD déçue

La société des auteurs compositeurs SACD a été la première à réagir officiellement, regrettant les 5% de souplesse pour la production d’oeuvres non-patrimoniale, seule M6 ayant ce type de facilité parmi les chaînes hertziennes, et que la part d’oeuvres d’expression originale française ne soit que de 75% au lieu de 85% pour les chaînes hertziennes. La SACD s’étonne aussi que des critères de diversité des oeuvres (dans le documentaire et l’animation) aient été fixés sans concertation avec les auteurs, l’animation notamment ayant une part très congrue.

Le communiqué du CSA sur son site et liens vers les conventions de chaque plateforme

Le communiqué de la SACD Quel manque d’ambition culturelle!

Update 10/12/21 : Ce vendredi après midi, c’est au tour des syndicats des producteurs de réagir. AnimFrance, sans surprise, dénonce « un conventionnement des plateformes au rabais pour l’animation ». Le syndicat fait le calcul de ce qu’est l’obligation de 4,4% pour Netflix et 3,5% rapporté au chiffre d’affaires, on tomberait alors à 0,56% et 0,7%. Il s’étonne qu’Amazon n’ait pas d’obligation en animation, alors que la plateforme propose une offre quasi aussi importante que Netflix. L’union syndicale des producteurs audiovisuels l’USPA pour sa part estime le niveau minimum d’investissement pour le documentaire offensant pour le genre. Transformé en euros, Netflix et Amazon ne se sont effet engagé à investir qu’1M€ par an. Le syndicat regrette que le CSA ait fait le choix de se substituer à la négociation interprofessionnelle.

Update 14/11/21 : Lundi, réagissait la SCAM, société des auteurs, qui se réjouit de l’aboutissement du processus intégrant les plateformes, mais trouve notamment, aussi, que le documentaire est « le dindon de la farce ». Tout comme le SPECT, dont les positions en tant que syndicat des producteurs de flux cependant diffèrent : le pourcentage de 5% de souplesse pour les oeuvres non patrimoniales lui semble à lui faible, représentant 10 à 12 millions sur les 200 à 240M€ attendus dans la création. Le SPECT, qui espérait 10%, signale que le fait de ne pas davantage intégrer les oeuvres non patrimoniales est en rupture avec les conventions des chaînes traditionnelles, et s’inquiète de l’avenir du secteur des divertissements peu prisé par les plateformes, mais salue notamment les avancées d’investissements minium dans le spectacle vivant.

Amazon renforce ses engagements en documentaire et en animation

Update : le 1er décembre 2022, Amazon Prime Video a signé un nouvel accord avec les organisations syndicales de producteurs et d’auteurs : AnimFrance, le SATEV, le SEDPA, le SPI, l’USPA  et la SACD augmentant à 13 % au lieu de 6% son obligation d’investissement dans le documentaire de création, le spectacle vivant et l’animation, dont un minimum de 5% pour le documentaire, et 5% pour l’animation. Prime video augmente aussi la part de production indépendante à 70% (au lieu de 66%) . Les émissions de flux (comme la télé-réalité) ne font plus partie des obligations. Ce qui ne veut pas dire que la plateforme n’en fera plus, mais elles ne seront pas pris en compte au titre de ses obligations. Voir le communiqué commun, plus détaillé, sur le site de la SACD.

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